La décision rendue ce 27 mars 2023 par le Conseil d’Etat est d’une grande importance théorique et pratique. A titre liminaire, il importe de rappeler que l’obligation d’évaluation environnementale des projets susceptibles de porter atteinte à l’environnement est un des instruments principaux du droit de l’environnement.
Aux termes de la présente décision, le Conseil d’Etat réalise un équilibre entre, d’une part une interprétation stricte du contenu de l’étude d’impact, lequel doit porter sur les incidences directes et indirectes prévisibles d’un projet sur l’environnement et, d’autre part le principe de proportionnalité de ladite étude d’impact.
S’agissant de l’obligation d’évaluation des incidences indirectes du projet sur l’environnement, cette décision appelle les deux observations suivantes.
En premier lieu, cette décision contribue à préciser quel doit être le contenu exact de l’étude d’impact et, notamment le contenu de l’analyse des incidences directes indirectes du projet sur l’environnement. Cette décision augmente le niveau d’exigence qui doit être celui de l’administration puis du juge administratif en matière d’évaluation environnementale et donc, aussi, d’autorisation des projets industriels. Les opérations d’exploitation de ces derniers ne peuvent pas être isolées des opérations d’extraction ou d’approvisionnement qui contribuent à ladite exploitation.
En deuxième lieu, cette décision est importante pour l’approvisionnement des installations industrielles en ressources naturelles. Dés le début du présent contentieux, une des principales questions débattues par les parties a tenu à la régularité de l’étude d’impact versée au dossier de demande d’autorisation d’exploiter : cette étude d’impact devait elle comporter une analyse des incidences des coupes de bois susceptibles d’être effectuées à l’étranger notamment au Brésil ou aux Etats-Unis d’Amérique pour alimenter la centrale ?
Si l’exploitant a, en 2021, modifié son plan d’approvisionnement pour ne plus utiliser de bois extrait à l’étranger, cela n’a pas eu d’effet sur l’analyse du Conseil d’Etat :
Comme le souligne la décision ici commentée, cette question de l’approvisionnement en bois est d’autant plus importante que la consommation de cette ressource devait être élevée :
“3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’alimentation de la tranche n°4 de la centrale de Provence supposera un approvisionnement en combustibles, et tout particulièrement en bois. Les ressources en bois d’origine locale devraient représenter, d’après le plan d’approvisionnement établi en 2011 et figurant dans le dossier soumis aux juges du fond, 27% de l’énergie entrante dans la centrale, cette part devant ensuite monter à 50%, le total de la biomasse d’origine locale devant, selon l’avis de l’autorité environnementale du 22 mai 2012, représenter un volume annuel de 370 000 à 580 000 tonnes. Les associations requérantes soutiennent que l’étude d’impact, si elle présente une estimation de la part prévisionnelle des principaux combustibles dans l’approvisionnement de la centrale, était insuffisante, faute notamment d’analyser les effets, pour les massifs forestiers, de la mise en œuvre de ce plan d’approvisionnement en bois“.
La décision rendue ce 27 mars 2023 par le Conseil d’Etat ne fait pas état du lieu d’extraction du bois mais de l’importance de sa consommation comme combustible et de la sensibilité des milieux dans lesquels est réalisée cette extraction. Ainsi, que la ressource soit extraite localement ou loin du lieu d’exploitation de l’installation pour laquelle une autorisation d’exploiter a été demandée : l’étude d’impact doit couvrir ces conditions d’approvisionnement.
A lire l’intégralité de l’article sur le site de notre confrère Arnaud Gossement